L'an 2000.
Paris, Londres, Amsterdam, Rome, Lisbonne... reflètent chacune à leur manière l’éden ou l’enfer, la lumière ou l’obscurité. Cela dépend de la manière dont on les vit, ne croyez-vous pas?
Si vous voulez avoir la sécurité de l’emploi devenez fonctionnaire ou allez en ville. Le travail dans les campagnes est terminé, à part labourer... La ville offre le large éventail des métiers de l’an deux mille et la densité des entreprises au kilomètre carré vous permet de changer de boulot sans déménager, de plus les salaires sont élevés. Dans notre société de consommation, l’argent apporte le bonheur, surtout en ville où les distractions ne manquent pas. Cinémas, théâtres, écoles, bibliothèques... toute la culture est à la portée de tous. Vous êtes libre de penser mais aussi d’agir, car personne ne vous connaît, personne pour critiquer vos mœurs ou votre manière de vous habiller. Et puis en ville il est prouvé que la vie est plus longue, en effet la proximité des grands hôpitaux évite de nombreuses morts précoces. Et puis surtout en ville on est sûr de ne pas attraper le rhume des foins, salle maladie qui fait pleurer et moucher toute la journée.
Le pollen est en effet absent, car les arbres et les fleurs sont souvent des hybrides stériles, seuls capables de résister aux fumées âcres qui font cracher le passant asthmatique. Les grosses voitures climatisées génératrices de puanteur sont les seuls refuges réservés, immatriculés pour rouler un jour sur deux. Dans cette circulation toxique, le citadin solitaire est contraint de marcher vite, poussé par la multitude. La peur de trouver au prochain coin de rue un robin des villes, le stigmatise. L’erreur coûte cher, le moindre faux pas dans cette foule qui grouille et la chute est vertigineuse, jusqu’au-dessous des ponts, sous une pile de carton : là, vivent les exclus.
Dans l’existence rien n’est jamais tout blanc ou tout noir, même après plusieurs lavages de cerveau la vie est toujours un peu sale. La vie en ville est un mélange de journées ensoleillées et de journées pâles. Sur la tour de l’ingénieur Effel le compte à rebours a commencé, en chiffres enluminés, une ère nouvelle nous est annoncée. Tout va-t-il vraiment changer?
J.Borghese 1998
Joseph BORGHESE dit TERATUS